Côte d’Ivoire : La Mort Alino Faso, le procureur sort du silence, pour mieux embrouiller ?

Dans une mise en scène télévisée digne d’un mauvais film policier, le procureur de la République près le tribunal de première instance d’Abidjan, Oumar Braman Koné, s’est livré ce dimanche à un exercice périlleux : parler sans rien dire, tout en niant ce que tout le monde soupçonne.
Face caméra, le magistrat a tenté de désamorcer la crise diplomatique grandissante entre la Côte d’Ivoire et le Burkina Faso après la mort suspecte de l’activiste burkinabè Alain Christophe Traoré, alias Alino Faso, décédé le 24 juillet dernier en détention. Mais au lieu de lever le voile sur une affaire qui pue le scandale d’État, c’est un épais brouillard institutionnel qu’il a préféré souffler à l’antenne.
« Il était poursuivi pour complot contre l’autorité de l’État, espionnage… », a déclaré le procureur, avec un ton détaché qui ferait presque oublier qu’un homme est mort, dans une gendarmerie et dans des circonstances que personne ne semble vouloir éclaircir. Les mots sont lâchés, lourds de sous-entendus, mais vides de preuves. Comme si l’accusation suffisait à faire taire les questions.
Et que dire de cette description surréaliste des « conditions carcérales » d’Alino ? À l’écouter, on croirait presque que l’activiste bénéficiait d’un séjour en résidence surveillée VIP, alors même que les rumeurs évoquent violences, privations et pressions psychologiques et des séances de torture. Une rhétorique trop bien huilée pour ne pas sentir le déni institutionnalisé.
Le Burkina Faso, qui dénonce un « assassinat crapuleux », attend toujours des explications concrètes. Mais du côté ivoirien, on préfère manifestement l’opacité à la transparence. Cette intervention, censée rassurer, ressemble surtout à un aveu masqué : celui d’un pouvoir qui perd pied face à une vérité qu’il ne contrôle plus.
Plutôt que d’apporter des réponses, le procureur a donné une masterclass de diversion, transformant une tribune judiciaire en théâtre de l’absurde. Et si, au lieu de faire du cinéma, on ouvrait enfin une vraie enquête indépendante ?
Amen K.