Afrique : Pesticides cancérogènes, quand l’Europe continue d’inonder le continent noir.

Afrique : Pesticides cancérogènes, quand l’Europe continue d’inonder le continent noir.

Depuis plusieurs années, des ONG mettent en lumière des scandales liés aux échanges commerciaux entre l’Afrique et l’Europe. Le plus récent concerne l’exportation massive de pesticides prohibés sur le territoire européen, mais encore largement écoulés vers le continent africain. Selon une enquête publiée le 23 septembre dernier par l’ONG suisse Public Eye et Unearthed, la cellule d’investigation de Greenpeace Royaume-Uni, l’Union européenne (UE) a autorisé en 2024 l’expédition de 9 000 tonnes de pesticides interdits vers l’Afrique. Ces révélations s’inscrivent dans un bilan plus large : 122 000 tonnes exportées vers 93 pays dans le monde.

Pour établir ces chiffres, les deux organisations ont analysé des centaines de notifications d’exportation transmises par les entreprises concernées à l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA) et aux autorités nationales.

En Afrique, les principales destinations sont le Maroc et l’Afrique du Sud, qui ont respectivement reçu 3 264 et 2 153 tonnes, soit 60 % du total des volumes destinés au continent. Parmi les produits concernés figure le dichloropropène (1,3-D), utilisé pour protéger les fruits et légumes des ravageurs, mais classé « cancérogène probable » aux États-Unis et interdit dans l’UE depuis 2007 en raison de ses risques pour les nappes phréatiques et la biodiversité.

Si la Commission européenne (CE) avait promis de mettre fin à ces exportations dans le cadre de sa stratégie sur les produits chimiques, le rapport dénonce une « inaction » flagrante. L’activité demeure florissante, portée par des géants comme Syngenta (Suisse), BASF (Allemagne) ou encore Corteva Agriscience (États-Unis).

Public Eye fustige une politique du « deux poids, deux mesures » qui met en danger les populations des pays à revenu faible ou intermédiaire, lesquels représentent les trois quarts des destinations de ces produits. « Envoyer des pesticides interdits en Afrique, ou dans tout autre pays à faible revenu, n’est possible que si l’on considère les personnes qui les utilisent comme inférieures, et donc que l’on ne se soucie pas de leur santé. Cette pratique fait passer le profit avant les êtres humains », s’indigne Kara Mackay, coordinatrice de campagnes pour l’organisation sud-africaine Women on Farms.

Ce n’est pas la première fois que Public Eye dénonce un tel scandale. En 2019, l’ONG avait déjà révélé que la Suisse exportait massivement des cigarettes toxiques vers l’Afrique, principalement vers le Maroc, des produits qu’elle n’aurait jamais pu écouler en Europe. Ces révélations renforcent un constat inquiétant : l’Afrique reste une cible privilégiée pour des pratiques commerciales jugées inacceptables ailleurs, au mépris de la santé de ses populations.

Amen K.

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