RDC : Le grand écart entre l’accord de Washington et la réalité guerrière de l’Est

RDC : Le grand écart entre l’accord de Washington et la réalité guerrière de l’Est

Près de deux semaines après la signature d’un accord de paix historique à Washington entre la RDC et le Rwanda, un profond fossé sépare les engagements diplomatiques et la situation sur le terrain dans l’Est congolais. Cet écart alimente un débat intense au sein de la société civile et de la classe politique, entre scepticisme face aux violations persistantes et espoir dans le processus diplomatique.

Signé le 4 décembre 2025 sous les auspices du président américain Donald Trump, l’accord prévoyait un cessez-le-feu immédiat et le retrait des troupes rwandaises du territoire congolais. Pourtant, les organisations locales font état d’une aggravation des hostilités. À Goma, la société civile de Karisimbi, menée par Christian Kalamo, dénonce une « violation manifeste » du texte. Elle affirme que la coalition M23-AFC, soutenue par Kigali, continue non seulement d’occuper des positions, mais aussi de conquérir de nouveaux espaces, comme en témoigne récemment la chute d’Uvira.

« Aucun acte palpable ne reflète l’esprit des engagements », regrette Kalamo, soulignant que les populations civiles, premières bénéficiaires promises de la paix, ne voient ni amélioration de leur sécurité, ni retour à la stabilité, ni accès aux services de base. Pour ces observateurs directs, l’accord conserve pour l’instant un caractère essentiellement symbolique, vidé de sa substance par l’absence de mise en œuvre.

Une autre frange de la société civile, notamment dans le territoire de Lubero, adopte une posture plus nuancée, misant sur la patience diplomatique. Son président, Muhindo Tafuteni, reconnaît que « sur le terrain, rien n’a changé comme on s’y attendait ». Cependant, il estime que le pays a malgré tout « gagné quelque chose » sur le plan stratégique en scellant cet accord international. « Cette guerre ne se joue pas seulement sur le plan militaire, mais aussi, et surtout, sur le plan diplomatique », argue-t-il, appelant les autorités congolaises à redoubler d’efforts pour accélérer la matérialisation des engagements.

Cette vision est partagée par certains acteurs politiques, comme Ngulumira Amisi Frédéric du parti RDC-KML, qui félicite les signataires tout en les sommant de traduire leurs paroles en actes. « Cela ne devrait pas rester une simple expression d’intention… ils doivent avoir pitié de cette population », implore-t-il, invoquant l’humanité des dirigeants.

Le paradoxe est donc saisissant : d’un côté, une avancée diplomatique majeure, parrainée par les grandes puissances ; de l’autre, une escalade militaire qui prolonge les souffrances des civils. La crédibilité de l’accord de Washington se joue désormais dans sa capacité à inverser cette dynamique dans les tout prochains jours, sous peine de voir le scepticisme l’emporter définitivement sur l’espoir dans l’Est de la RDC.

Amen K.

admin

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *